Anecdotes de la Science – Les conditions de Karush-Kuhn-Tucker

Même dans un domaine tel que les mathématiques, la postérité ne tient parfois pas qu’aux résultats publiés…

William Karush (1917 – 1997) était un mathématicien, professeur émérite de l’Université d’État de Californie à Northridge. En 1939, à l’âge de 22 ans donc, il publie sa thèse, intitulée « Minima of functions of several variables with inequalities as side conditions ». Son travail passe alors complètement inaperçu.

Albert Tucker (1905 – 1995) était un mathématicien, ayant passé la majorité de sa vie autour de l’université de Princeton. On compte parmi ses thésards de célèbres mathématiciens, dont le prix Nobel d’économie John Nash.

Harold Kuhn (né en 1925) est un mathématicien, collègue de promotion et ami de John Nash, qui sans avoir été sous sa direction a néanmoins bénéficié des conseils de Albert Tucker pour sa thèse et d’autres articles. En 1951, il publie avec ce dernier l’article « Nonlinear programming », qui présente les conditions dites de Kuhn-Tucker, et rencontre aussitôt un grand succès auprès de la communauté scientifique.

La thèse de William Karush exprimait en fait pratiquement les mêmes conditions, et ce n’est qu’alors qu’il a reçu une reconnaissance. Par égard pour l’antécédence, on parle donc des conditions de Karush-Kuhn-Tucker.

Article « William Karush » sur Wikipedia (en anglais)

Anecdotes de la Science – Le dernier théorème de Fermat

Diophante vécu au troisième siècle, et écrivit un ouvrage intitulé « Arithmétique », dont il ne reste hélas aujourd’hui qu’une partie. Il s’y intéressait entre autres à la résolution d’équations quadratiques et à la décomposition de carrés en sommes de deux carrés.

Couverture : Arithmétique - Commentaires de Pierre de FermatPierre de Fermat vécu au XVIIe siècle, ce qui fait de lui un contemporain de René Descartes et Blaise Pascal. Il fit divers commentaires en marge d’une traduction latine de ce livre, que son fils publia d’ailleurs après sa mort sous la forme d’une version annotée.

Diophante considère que le problème consistant à décomposer un cube en la somme de deux cubes n’a pas de solution entière. Fermat observe (page 85 dans la version publiée avec ses notes) :

Cubum autem in duos cubos, aut quadratoquadratum in duos quadratoquadratos, et generaliter nullam in infinitum ultra quadratum potestatem in duos eiusdem nominis fas est dividere cuius rei demonstrationem mirabilem sane detexi. Hanc marginis exiguitas non caperet.

Ce qui est généralement traduit par :

Il est impossible de séparer un cube en deux cubes, ou une puissance de quatre en deux puissances de quatre, et d’une façon générale toute puissance de plus de deux en somme de deux entiers élevés à cette puissance. J’ai trouvé une merveilleuse démonstration de cette proposition. Mais la marge est trop étroite pour la contenir.

C’est pour le moins cavalier, d’autant qu’il aura fallu attendre plus de 350 ans pour qu’en 1995 ce théorème soit enfin démontré, par Andrew Wiles. Avec une démonstration tenant sur un millier de pages et faisant appel à des outils mathématiques qui n’existaient pas encore à l’époque, il semble aujourd’hui peu probable qu’il ait effectivement trouvé une démonstration correcte. Mais il aura donné du fil à retordre à des générations de mathématiciens !

Et cerise sur le gâteau, ce théorème n’a pratiquement aucune utilité. Par contre la recherche de sa démonstration a entraîné la découverte d’outils mathématiques très puissants…

Article « Dernier théorème de Fermat » sur Wikipédia

Anecdotes de la Science – Le petit Gauss

Nous sommes dans les années 1780, en ce qui est aujourd’hui l’Allemagne. M. Büttner est instituteur. Ses élèves étant ce jour là quelque peu dissipés, il leur demande d’additionner les nombres de 1 à 100, espérant bien obtenir un peu de calme.

Seulement voilà, à peine quelques instants plus tard, alors que tous devraient être en train de plancher pour encore un moment sur le problème, l’un deux prétend avoir le résultat : 5050. Le petit Carl Friedrich aura sans doute remarqué que si l’on additionne 1 et 100, 2 et 99, 3 et 98, et ainsi de suite, on obtient toujours 101, et donc déduit que la somme demandée vaut 101 × 50. Il inventait alors malgré lui la méthode de calcul de la somme des termes d’une suite arithmétique, aujourd’hui enseignée au lycée.

Carl Friedrich GaussL’histoire célèbre de ce gamin laissant son instituteur et son assistant stupéfaits est peut-être exagérée, voire tout simplement inventée. Ce qui est certain par contre, c’est que par la suite Gauss, auteur entre autres de théorèmes majeurs et d’une conjecture démontrée un siècle plus tard, a fait avancer de façon considérable les mathématiques, au point d’être aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands génies de l’histoire.

Article « Carl Friedrich Gauss » sur Wikipédia

L’histoire des sciences regorge d’anecdotes de ce genre ; je me propose d’en rappeler quelques unes au cours des prochains billets.