Quel futur en imagerie numérique – Un spectre affichable plus large

Depuis l’apparition des premiers affichages couleurs et jusqu’à aujourd’hui, les écrans reposent sur la nature de l’œil humain, et représentent les couleurs dans l’espace RVB (rouge, vert, bleu). L’objet de ce billet est de s’interroger sur la validité de ce choix, et de manifester une certaine impatience envers une nouvelle technologie en la matière.

Sans aller plus loin que quelques considérations superficielles, rappelons que la rétine, le capteur au fond de l’œil, est composée de bâtonnets, qui sont sensibles à la luminosité, et de trois types de cônes, respectivement sensibles à trois plages de fréquences grossièrement centrées sur le rouge, le vert et le bleu. C’est la raison pour laquelle les affichages utilisent les couleurs rouge, vert et bleu : c’est la synthèse additive.

Planche n°19 du test du Docteur Shinobu Ishihara
Pourtant tout le monde n’est pas nécessairement sensible à ces trois couleurs. L’exemple le plus commun est le daltonisme : certaines personnes n’ont que deux, voire un seul type de cône, ce qui explique le fait qu’elles sont incapables de distinguer certaines couleurs. La forme la plus commune de daltonisme (la deutéranopie : l’absence de cône sensible au vert) est ainsi de percevoir indistinctement le rouge et le vert.

Mais alors, inversement, les personnes non daltoniennes ne sont-elles pas finalement daltoniennes dans une certaines mesures elles aussi ? N’y a-t-il pas des couleurs que mêmes les gens avec une vision considérée comme normale ne peuvent distinguer ? Je n’entends pas par là notre capacité à ne percevoir que le spectre dit visible, où à nécessiter un minimum d’écart entre deux teintes pour pouvoir les différencier. Mais par exemple, lorsqu’un écran affiche du vert et du rouge simultanément, on perçoit du jaune. Mais est-ce du jaune pour autant ? Non. Pour s’en convaincre, testons : observons son spectre lumineux. Pour cela, voici donc l’image présentée dans le précédent billet, représentant différentes franges de couleurs.

Franges de couleur

Le but est donc de constater la contribution de chaque frange dans les différentes fréquences du spectre visible, qui rappelons-le ressemble à ceci.

Spectre de la lumière visible

Notez comme toutes les couleurs des franges sont présentes dans ce spectre. Idéalement, une frange devrait donc avoir une forte intensité à la fréquence correspondant à sa couleur, indépendamment d’une éventuelle intensité sur d’autres fréquences.

Avec l’aide d’un CD, ou de tout autre objet capable de diffracter la lumière, observons donc le spectre des différentes raies. Les photos qui suivent présentent plusieurs problèmes, qu’il convient de prendre en compte. L’écran de test tout d’abord est un cathodique (je referai peut-être un test avec un LCD si l’occasion se présente), dont le calibrage est probablement discutable. La balance des blancs de la prise de vue n’est quant à elle pas terrible, d’où un jaune qui semble tirer sur le vert. Enfin il faut remarquer que les franges ont une certaine largeur (il fallait pouvoir les photographier), ce qui entraîne un spectre moins précis (les décompositions sur la largeur d’une frange se chevauchent un peu). Ces remarques préalables étant faites, voici le résultat.

Frange blanche

Frange rouge

Frange jaune

Frange verte

Frange cyan

Frange bleue

Frange magenta

Prenons le cas de la frange jaune : l’écran est sensé afficher une raie de jaune. Pourtant sur le spectre on observe du vert et du rouge, et un peu de bleu (dû à la luminosité de l’écran, qui a tendance à blanchir les couleurs), mais en tout cas pas de jaune. Ce n’est pas du jaune. c’est seulement une couleur que l’on perçoit comme jaune. Enfonçons bien le clou : un écran ne peut pas afficher de jaune, pas plus qu’il ne peut afficher du cyan, du magenta, ou du blanc (le spectre devrait alors ressembler à celui indiqué plus haut). Cependant si l’on mettait du véritable jaune à côté on ne verrait pas la différence, car faute d’être sensible à cette couleur nos yeux réagissent de la même façon à ces deux couleurs.

Du moins, la majorité des gens ne verraient pas la différence. Car il existe également le contraire du daltonisme : des personnes ne possédant pas trois, mais quatre types de cônes différents (des quadrichromates ; il existerait mêmes des pentachromates), le quatrième étant sensible au jaune justement. Les personnes dans ce cas doivent donc percevoir la différence entre du jaune et un mélange de vert et de rouge aussi nettement que je perçois la différence entre du vert et du rouge. N’en connaissant pas personnellement (et je serais très intéressé par le témoignage de quelqu’un ayant cette expérience), je n’ai pas de témoignage le confirmant, mais j’ai la conviction que pour elles les écrans doivent sembler bien peu fidèles…

Notez d’ailleurs que même pour les personnes ayant une vue classique à trois types de cônes, la synthèse additive ne constitue pas une approximation suffisante. En effet, il existe des couleurs que la plupart des gens savent distinguer et que les écrans sont parfaitement incapables d’afficher. Vous n’êtes pas convaincu ? Vous voulez un exemple ? Essayez d’afficher du orange fluo pour voir.

Alors ma question est : quand aura-t-on des affichages qui ne soient plus basés sur cette astuce médiocre de la synthèse additive, mais qui soient véritablement capables d’émettre n’importe quelles fréquences (notez le pluriel) du spectre visible ? Dans un premier temps, l’amélioration peut passer par l’utilisation d’un plus grand nombre de couleurs primaires (voir ma note ci-après). Mais au delà, on peut imaginer la mise au point d’un matériau dont les caractéristiques chromatiques pourraient être contrôlées par excitation par un courant. On pourrait alors envoyer des signaux correspondant au spectre souhaité et obtenir la couleur correspondante, de la même façon qu’en envoyant à un haut-parleur un signal, on obtient un son ayant pour spectre le spectre de ce signal (avec plus ou moins de fidélité bien sûr).

La publication de ce billet a été pas mal retardée par la démonstration du spectre de l’écran, que je n’avais ni le temps ni l’occasion de réaliser (d’ailleurs un grand merci Boris pour le coup de main lors de la séance photo). Or entre temps j’apprenais par le site Akihabara News que Sharp travaille sur la construction d’un écran LCD avec cinq couleurs primaires. Cela me conforte donc dans la conviction que l’amélioration radicale du spectre des écrans est l’une des évolutions proches de l’imagerie numérique.

Beam

Article « Rouge vert bleu » sur Wikipédia

Cours « La vision des couleurs »

Article « Daltonisme » sur Wikipédia

Un dispositif de test simple pour observer le spectre d'un écran

Cette image qui pique les yeux est l’un des éléments d’une petite expérience liée à un prochain article. Elle va me servir à observer le spectre de la lumière émise par un écran selon la couleur affichée.

Bien que cela ne transparaisse pas tellement dans ce blog, un de mes sujets d’intérêts majeurs est la 3D, et plus généralement l’imagerie numérique. Si je n’ai ni la connaissance ni l’expérience suffisantes pour traiter avec régularité et aplomb du sujet, j’ai néanmoins quelques idées sur son devenir. Aussi je vais tâcher de publier quelques articles sur le thème : « Quel futur en imagerie numérique ». Plusieurs sont déjà en cours, dont certains pratiquement terminés.

L’un d’entre eux, qui devrait être le premier à être publié, concerne le spectre des écrans actuels et leurs lacunes. Afin de soutenir mon propos, j’ai besoin d’un dispositif simple permettant de mettre en évidence le spectre d’un écran. N’étant pas dans un laboratoire d’optique, je ne dispose bien évidemment pas d’un appareil permettant une quelconque mesure. De plus, je préfère une méthode simple, éventuellement grossière mais néanmoins rigoureuse, que n’importe quel lecteur peut reproduire.

Observer le spectre d’une source de lumière ? Un prisme bien sûr, répond-t-on automatiquement. Mais qui possède un prisme ? En avez-vous ne serait-ce que déjà eu un entre les mains ? Moi non, ou peut-être une fois, dans un lointain cours de physique au lycée. Il va donc falloir trouver autre chose de plus commun. Alors que je faisais le tour de ce qui pouvait faire l’affaire, mon attention s’est arrêtée sur… un CD traînant sur mon bureau (sourire bête et bienheureux de celui qui vient de trouver une solution simple et inattendue à son problème). Tout le monde possède au moins un CD. :-) Un rapide test réalisé immédiatement après s’est avéré concluant.

Ça fait un peu solution bricolage, mais après tout les expériences d’Augustin Fresnel (dont j’ai déjà parlé) étaient autrement plus rudimentaires, et lui ont pourtant permis d’obtenir des résultats qui feront trembler la communauté scientifique. Et par « rudiementaires », il faut comprendre qu’il faisait des mesures sur des rayons de lumière éclairant des fils de fer en traversant des gouttes de miel, faute de lentille !

À venir donc, une petite réflexion sur la technologie actuellement utilisée pour les affichages, dès que j’aurai pu tester et photographier le bricolage expérimental dont il est question.

Dans la peau d'un blogueur influent

Ce week-end j’ai participé à l’organisation de la convention Epitanime 2009, un évènement autour du manga, de l’animation japonaise et de certains aspects de la culture japonaise. Parmi les nombreuses anecdotes qui arrivent nécessairement dans ces cas là (c’est un forfait indivisible :-) ), je me propose de vous raconter celle où j’ai testé pour vous et malgré moi : être dans la peau d’un blogueur influent.

Je ne m’intéresse aucunement aux mangas, mais plus à la culture japonaise en général, ce qui n’est pas vraiment l’objet de cette manifestation. Aussi ce n’est nullement ce qui me pousse à y prendre part. La raison essentielle est simplement que participer à l’organisation d’évènements de cette taille est à la fois très enrichissant et vraiment amusant, bien qu’épuisant. De plus, la motivation et le travail de cette association suffisent à justifier de leur prêter main forte. Voir des gens se bouger pour faire des choses est trop rare pour ne pas être encouragé.

Les moments de calme sont idéaux pour saluer les personnes que l’on n’a pas vu depuis longtemps, ainsi que toute autre forme d’activité sociale. Organisateurs, spectateurs, presse… Amis ou simples visages connus, d’année en année on retrouve des habitués, des vieux même dit-on entre nous, et c’est parfois la seule occasion de l’année de les voir, notamment lorsqu’ils viennent de loin.

Samedi matin, alors que l’activité était encore calme dans la section dont je m’occupais, nous discutions donc avec légèreté (mais par moments aussi, lourdeur :-) ) de choses et d’autres… Tandis que le petit groupe que nous étions débattions de sujets aussi importants que comment chacun allait, le problème de la contrefaçon, ou encore la longueur des jupes, mon interlocuteur me passait sa peluche (ou alors c’est moi qui la lui ai prise, à vrai dire je ne me souviens plus), et je commençais à jouer avec, pour finalement la poser sur mon épaule et continuer à discuter en l’oubliant presque. Un mignon, quoi que poussiéreux, petit raton-laveur, avec comme chaque année ses quatre bracelets d’entrée (deux jours et deux nuits) attachés autour de la queue.

Habillé en Raton
(Merci Noryu pour la photo !)

C’est alors que rentrent deux visiteurs qui s’arrêtent stupéfaits en nous voyant, et s’exclament : « C’est la peluche du raton ? » Et moi de leur répondre « Oui, bien sûr », avec le ton de l’évidence de la personne pour qui cette peluche n’est que celle d’un personnage habituel et même obligatoire de la convention (qui a dit folklore ?). Les deux s’agenouillent alors immédiatement devant moi dans un simulacre d’idolâtrie : « On est… pas dignes ». Moi, avec un ton blasé, pointant le propriétaire de la peluche du doigt : « Raton, c’est lui… ».

Je me demande juste ce qu’a ressenti Raton en se voyant couvrir de fleurs à la troisième personne. :-) En tout cas il avait l’air touché par le discours de ses deux fans, une fois sa personne correctement identifiée. ;-)

WordPress et les captcha

Ce blog qui était épargné jusqu’ici a apparemment été récemment découvert par une machine à spam. Un bot s’entête en effet depuis quelques jours à me dire que mon bref article sur les interfaces du futur est génial, que c’est une bonne idée, qu’il devrait essayer, et autres compliments vides de sens, en anglais évidemment. Avec deux ou trois tentatives quotidiennes, ça reste néanmoins limité, sans commune mesure avec les centaines que des blogs plus importants subissent. Mais en grand fainéant cela suffit à me fatiguer au point de chercher une solution.

Celle qui me vient à l’esprit en premier est l’utilisation d’un captcha. Non pas une image d’un texte vu à travers un fond de bouteille de vodka préalablement vidée, mais juste une question absolument triviale, dont l’effet à déjà fait ses preuves à mes yeux. J’avais en effet déjà implémenté une telle fonction sur le forum de l’ancien site de Prologin avec la question « Combien font deux et deux ? », à laquelle il était possible de répondre en chiffres ou en lettres (ainsi que « 42 », à la demande de quelques candidats). Ce bout de code s’était révélé autrement plus efficace que le module Akismet, à l’effet très discutable, puisque l’on n’avait plus jamais eu le moindre problème depuis lors.

Néanmoins, plutôt que d’aller faire rentrer ça à la hache et au marteau comme précédemment, je me suis dit que quelqu’un avait déjà dû le coder sous forme de module, et qu’une petite recherche serait le plus simple. À défaut de m’avoir encore permis de trouver exactement ce que je cherche, elle aura été très instructive.

Tout d’abord il est partout conseillé d’utiliser Akismet, mais ayant constaté son échec sur le forum de Prologin, c’est la première chose que j’ai désactivée en mettant ce blog en ligne. De plus, sur un site plus important, je ne serais pas surpris que le traitement impliqué ait un coût.

Viennent ensuite les captcha à base d’images brouillées. Cette solution me semble poser quatre gros inconvénients.
Exemple de captcha

  • Tout d’abord elle est pénible : ce type de système me gène en tant qu’utilisateur, et j’imagine que c’est le cas de beaucoup d’autres, même sans aller jusqu’à des extrêmes comme ce grand gagnant (j’ai testé aussi, et je vous recommande de le faire, c’est proprement hallucinant : l’inscription au forum de pompiers.fr). La raison en est simple : il s’agit de chiffres et lettres aléatoires, qui n’ont donc aucun sens, et nécessitent de ce fait une certaine concentration.
  • De plus ces images sont souvent difficilement lisibles, comme le résume très démonstrativement cet article.
  • Ensuite la méthode manque d’accessibilité. Accessibilité, ce n’est pas un mot à la mode à sortir quand on n’a plus d’argument contre des technos qui permettent de faire des sites kikoolol avec des trucs qui clignottent. J’ai un ami qui utilise un clavier braille pour aller sur Internet : pour lui, l’accessibilité, c’est ce qui sépare le net auquel il a accès du reste.
  • Enfin, cette solution s’avère finalement peu efficace face aux progrès de la reconnaissance de forme. En janvier une équipe russe publiait en effet avec fracas un article de recherche traitant de reconnaissance de captcha, et annonçait un taux de réussite de 35% sur les images générées à l’époque par le site Yahoo!, ce qui est amplement suffisant pour en ruiner l’effet. D’ailleurs, sans recourir à ces approches techniques, d’autres spammeurs font lire les images par des utilisateurs en les mettant sur des sites à fort trafic, comme par exemple des sites pornographiques.

Au cours de cette recherche, j’ai également vu passer une méthode à base de son. Cette approche me semble être encore pire que la précédente, aussi je ne vais pas m’étendre plus.

Afin de se débarrasser de la gène occasionnée, certains modules tels que WP Captcha-Free ou WP-SpamFree utilisent le Javascript ou les cookies pour automatiser la reconnaissance du type de visiteur. C’est un moindre mal, mais imposer ces fonctions me gène, toujours pour des raisons d’accessibilité.

Enfin on arrive au méthodes textuelles. Les méthodes dites mathématiques (« arithmétiques » corrigeront les plus rigoureux) semblent être les plus populaires, en témoignent les citations fréquentes de Math Comment Spam Protection Plugin par exemple. Les méthodes textuelles on l’avantage de ne plus poser le problème de l’accessibilité, du moins quand elles restent raisonnables. Le lien que j’ai déjà cité donne quelques exemples d’abus qui en plus d’être tristement risibles, sont parfaitement inefficaces. Reconnaître une expression dans un texte et en retourner le résultat est en effet du domaine du trivial, et demander de calculer la deuxième sur deux ne fait que réduire le taux de réussite d’un bot à 50%. Aussi pénible et peu efficace est remarquable.

À mon avis l’efficacité d’un simple texte pour un captcha réside dans l’analyse sémantique qu’elle nécessite. « Quel fruit pousse sur un pommier ? » est une question simple, ne demandant aucune réflexion, mais qui requiert un traitement du langage qui nous met à l’abri pour cinq à dix ans au moins. WP-Gatekeeper fait partie des modules reposant sur cette technique. N’en ayant pas encore trouvé d’autres de ce genre, mon choix n’est cependant pas encore arrêté. Toute suggestion est d’ailleurs bienvenue. :-)

Pour finir, voici un article en anglais où l’auteur semble avoir constaté lui aussi une grande efficacité pour un bout de code écrit rapidement.

Vu sur une borne SNCF

Ça a certes moins de classe qu’un distributeur de billets de banques, mais une borne SNCF qui reboote en boucle a son charme aussi, d’autant plus lorsqu’elles sont toute une rangée à tenter, de concert mais en vain, de démarrer Windows. Voici en image un petit souvenir. Bon, heureusement que j’avais prévu que le retrait d’un billet avec une telle borne me coûterait dix minutes au bas mot. Si vous n’avez jamais utilisé une telle borne, soyez prévenu qu’elles sont d’une rare lenteur, ce qui multiplié par quelques personnes faisant la queue, peut entraîner une perte de temps conséquente.
Borne SNCF démarrant Windows